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Guide sur la gestion des couleurs pour écran professionnel

Mark Wood
2017/05/29

Fine Art and Commercial Photographer / UK

Photographer Mark Wood splits his time between commercial work and teaching, whilst ensuring he makes time for his personal projects. Mark trained as a printmaker, utilizing the traditional techniques of etching and lithography to create fine art print, before moving to digital print in the mid 90’s.






Figure 01: A rare selfie of me. This is my where I process my images.

 

Beaucoup de photographes n’aiment pas la gestion des couleurs qui est souvent perçue comme une tâche trop complexe ou simplement trop fastidieuse. En effet, la gestion des couleurs peut être ces deux choses, mais pas nécessairement. Ce bref article présente la théorie qui sous-tend la gestion des couleurs. Nous allons montrer le chemin qu’empruntent les couleurs numériques, en partant de la prise de vue avec un appareil photo pour finir avec l’affichage sur écran ou l’impression. Nous en profiterons également pour expliquer certains termes techniques. En tant qu’enseignant, j’aime voir les réactions des étudiants pendant les cours, cela me permet de mieux comprendre la façon dont ils perçoivent mes enseignements. Dans cet article, nous allons nous concentrer sur les principes fondamentaux et j’espère être aussi clair et synthétique que possible pour la majorité d’entre vous.

Je donne des cours depuis le début des années 1990 à des étudiants en université ainsi qu’à de nombreux professionnels et photographes amateurs. Ce tutoriel rassemble toutes mes recherches en gestion des couleurs ainsi que mon expérience en tant que designer graphique et photographe professionnel.

Les sujets que nous allons aborder sont : pourquoi les couleurs sont-elles importantes ; comment obtenir des couleurs fiables ; les modèles de couleur ; traduire des couleurs entre différents appareils et diagnostiquer la gestion des couleurs. Tout d’abord, nous allons commencer par définir ce qu’est la gestion des couleurs.

Définition de la gestion des couleurs

L’art et la science de retranscrire des couleurs naturelles de manière précise et fiable à l’aide d’un appareil numérique.

La gestion des couleurs est un art, étant donné que ce que nous considérons comme « beau » reste, dans une certaine mesure, quelque chose de subjectif. Obtenir des couleurs précises, d’un point de vue technique, n’est que la première étape. Les couleurs doivent être modifiées pour gagner en justesse. J’expliquerai ce point plus en détail dans un prochain tutoriel dédié aux tirages fine art.

La gestion des couleurs est aussi une science. Les appareils que nous utilisons, que ce soient des appareils photo, des écrans ou des imprimantes, peuvent être étalonnés et profilés pour fournir des résultats prévisibles. Il est également préférable d’utiliser une méthodologie scientifique qui permet non seulement de respecter certaines normes internationales, mais aussi d’éviter les solutions faites maison qui marchent uniquement pour nous et qui ne sont pas assez fiables pour envoyer nos images à d’autres personnes. Mes deux prochains articles porteront sur l’étalonnage des écrans Colour-Critical et les préférences de couleurs dans Adobe Photoshop, Lightroom et d’autres logiciels.

Penchons-nous sur le jargon technique. Étalonner un appareil signifie le configurer selon un ensemble de valeurs précis. On pourrait d’ailleurs faire l’analogie avec un groupe de musiciens qui accordent leurs instruments avant un concert. Chaque instrument peut produire une gamme de notes différente, mais les notes communes à tous les instruments doivent être les mêmes. Le profilage est lié à l’étalonnage, il s’agit d’un registre des couleurs disponibles dans un appareil. Par exemple, un écran bas de gamme aura un ensemble de valeurs plus réduit qu’un écran Colour-Critical. Les profils permettent de traduire les couleurs d’un appareil à un autre.

Sans être trop pointilleux, il est tout de même important de noter que la gestion des couleurs permet seulement d’obtenir des couleurs plus prévisibles, car il n’existe aucun système de correspondance des couleurs précis à cent pour cent. Il faut considérer la gestion des couleurs comme un moyen d’obtenir des couleurs fiables pour nous permettre de dédier un maximum de temps à l’aspect créatif de la photographie.

Sans être trop pointilleux, il est tout de même important de noter que la gestion des couleurs permet seulement d’obtenir des couleurs plus prévisibles, car il n’existe aucun système de correspondance des couleurs précis à cent pour cent. Il faut considérer la gestion des couleurs comme un moyen d’obtenir des couleurs fiables pour nous permettre de dédier un maximum de temps à l’aspect créatif de la photographie.

Pourquoi les couleurs ne sont pas identiques

Lorsque vous prenez des photos en plein air, la luminosité ambiante varie énormément, passant d’une gamme de tonalités plutôt modeste pendant une journée nuageuse à une gamme bien plus riche un jour de beau temps. La nuit, la différence entre les zones éclairées par les réverbères et les zones sombres, par exemple, est d’autant plus grande. En tant que photographes, nous sommes forcés de reconnaître qu’un appareil photo ne peut pas toujours saisir toutes les couleurs et les nuances que nous voyons. Les appareils photo ont généralement la plage de tonalités la plus vaste de tous les appareils utilisés par les photographes. La plage de tonalités des écrans varie en fonction du type d'écran, et les tons et couleurs d’un tirage dépendent de l’imprimante et du papier utilisés.

Voici quelques faits importants sur la gestion des couleurs

  1. Une image imprimée n’est jamais la copie parfaite d’une image numérique, telle que nous la voyons sur un écran. Toutefois, des simulations sur ordinateur permettent d’obtenir un résultat très proche.
  2. Tout processus de gestion des couleurs implique de faire des essais et des erreurs, mais en perfectionnant vos connaissances et en acquérant du matériel spécialisé, vous verrez que ce processus devient de plus en plus facile.
  3. La gestion des couleurs dépend de la qualité de l’équipement utilisé, 
  4. mais aussi des paramètres de l’appareil photo, comme la sensibilité ISO, l’ouverture, la balance des blancs, les effets de couleurs et le type d’objectif utilisé. Pour obtenir les meilleurs résultats possible, vous devez prendre vos photos au format RAW. Je parlerai plus en détail du format de fichier RAW dans un prochain article.
  5. Le système informatique et le logiciel de retouche utilisés sont aussi importants, tout comme les paramètres de préférence de votre système d’exploitation et de votre logiciel de retouche. Sur les ordinateurs Windows et Mac, Adobe Photoshop gère les couleurs de manière très efficace.
  6. L'écran que vous utilisez est très important. J’ai d’ailleurs abordé ce sujet dans mon article de 2016 (en anglais) « Don't Get Fooled Again (Why Monitors Matter) », que vous pourrez trouver facilement sur Internet. Votre écran est une fenêtre sur vos images numériques.

Il est donc essentiel de le configurer pour qu’il affiche correctement les couleurs et les tonalités de vos photos. Les écrans bon marché offrent une plage de couleurs et une fidélité de reproduction des couleurs nettement inférieures à celles des écrans Colour-Critical haut de gamme de BenQ.

  1. Qu’il s’agisse de modèles minilab, USB-C ou inkjet, les imprimantes possèdent toutes des caractéristiques différentes en termes de couleur. La technologie, le type d’encre, le support (généralement du papier) et le profil utilisés par une imprimante ont une influence sur le rendu des couleurs.
  2. Les tirages réalisés sur différents papiers auront des couleurs différentes – les tirages sur papier satiné seront plus contrastés que ceux réalisés sur papier mat et  les papiers colorés, comme le papier sépia, ne peuvent pas restituer les tons de blanc les plus lumineux.
  3. Lorsque l’on regarde une image, les conditions d’éclairage environnantes affectent également notre perception des tons et des couleurs. Les conditions de travail et d’observation doivent être prises en compte. La position de l'écran ainsi que l’intensité et la couleur de la lumière ambiante ont un effet sur la perception des couleurs. Sous une lumière artificielle, deux tirages peuvent paraître identiques, mais il est possible que la lumière du jour ou une source de lumière à spectre complet révèle des différences de couleur entre ces deux tirages.





Figure 02: A representation of the digital darkroom conditions I work in.

 

Pour souligner l’importance des périphériques de sortie (par ex. un écran ou une imprimante), nous allons imaginer un scénario avec trois périphériques de sortie différents. On a paramétré chaque périphérique pour qu’il produise le rouge le plus lumineux dont il est capable et nous appellerons ce rouge le ROUGE LE PLUS LUMINEUX. À cause de légères variations dans la fabrication de chaque appareil, le ROUGE LE PLUS LUMINEUX produit par ces trois périphériques sera différent. Le périphérique A produit le rouge le plus vif et le périphérique C le plus terne, tandis que le périphérique B produit un rouge légèrement bleuté. En théorie, il est possible de diminuer l’intensité du ROUGE LE PLUS LUMINEUX du périphérique A jusqu’à atteindre le ROUGE LE PLUS LUMINEUX du périphérique C, mais le périphérique C ne pourra jamais produire le ROUGE LE PLUS LUMINEUX du périphérique A. On peut donc conclure que le périphérique A représente le meilleur choix des deux.





Figure 03: THE BRIGHTEST RED produced by the three devices will be different.

 

Certaines couleurs ne sont pas reproductibles au moment de l’impression. J’expliquerai ce que sont les modèles de couleur sous peu, mais pour l’instant, rappelons que les appareils photo captent les couleurs selon trois canaux. Ces canaux de couleurs sont le rouge, le vert et le bleu (RVB) – le même modèle de couleurs que celui des écrans, des smartphones et des vidéoprojecteurs de données. La plupart des imprimantes utilisent quatre canaux de couleurs, soit le cyan, le magenta, le jaune et le noir (CMJN). Les appareils CMJN ont moins de couleurs que la plupart des appareils RVB. Connaître cette différence vous épargnera des heures de frustration à essayer de faire correspondre un tirage CMJN à sa version numérique sur un écran RVB. La gestion des couleurs peut aider, mais à certaines conditions.




Figure 04: The photograph on the left is a RGB image. The photograph on the far right is a CMYK simulation of the same shot.

 

Pour mieux comprendre la différence entre le CMJN et le RVB, regardez les photos du guitariste ci-dessus. La photo de gauche est en RVB. La photo tout à droite simule le rendu de cette même image en CMJN – comme vous êtes sûrement en train de lire cet article sur un écran, il serait faux d’affirmer que cette photo est en CMJN étant donné qu’elle est affichée sur un appareil RVB. À l’inverse, si vous aviez imprimé cet article, la photo sur la gauche serait une simulation d’une image en RVB. En classe, j’attends normalement un petit moment pour laisser les étudiants digérer cette information et poser des questions avant de poursuivre, car c’est un point important.

Continuons. En observant les photos ci-dessus, vous remarquerez que le rouge de la simulation CMJN est plus terne que celui de la version RVB. Ces différences de couleur peuvent être observées en activant l’option Couleurs non imprimables dans Photoshop, comme le montre la photo du milieu. La plage de couleurs disponibles dans un modèle de couleurs est connue sous le nom de gamme ou « gamut ». Dans Photoshop, l’option Couleurs non imprimables permet de détecter et de corriger d’éventuels problèmes, mais la meilleure façon d’évaluer les changements de couleur entre la source et la sortie est la vérification logicielle dont nous parlerons dans un autre article.

Avoir une bonne compréhension des modèles et des espaces de couleur et de la portée de leur gamut est essentiel pour la gestion des couleurs. Le ROUGE LE PLUS LUMINEUX en CMJN sera très différent du ROUGE LE PLUS LUMINEUX en RVB. Rappelez-vous, le ROUGE LE PLUS LUMINEUX fait référence au rouge le plus vif et le plus intense que l’on puisse reproduire sur un appareil donné.

Comme mentionné précédemment, un papier mat produira toujours des couleurs plus ternes qu’un papier satiné. Donc, si le ROUGE LE PLUS LUMINEUX du périphérique A était imprimé à la fois sur du papier mat et satiné, le ROUGE LE PLUS LUMINEUX du papier mat serait plus pâle que celui du papier satiné.

Comment obtenir des couleurs fiables

Pour obtenir des couleurs fiables, mieux vaut adopter une approche logique et sereine : faire au plus vite en cliquant sur des options au hasard n’apportera rien de bon. La gestion des couleurs demande un peu de calme et de concentration. Les étapes menant à une gestion efficace des couleurs sont :

  1. Optimisation du système et choix du profil
  2. Profilage de l'écran
  3. Paramètrage des options du système d’exploitation, des pilotes d’imprimante et du logiciel de retouche (par ex. Photoshop).
  4. Profilage des appareils photo, scanners et imprimantes (cette étape est facultative)
  5. Diagnostic des couleurs (veuillez noter que l’on parle ici de couleurs « fiables ». D’un point de vue scientifique, une image numérique ne peut pas être identique à un tirage papier. La gestion des couleurs vous permettra d’obtenir un rendu des couleurs prévisible et satisfaisant.

Veuillez noter que l’on parle ici de couleurs « fiables ». D’un point de vue scientifique, une image numérique ne peut pas être identique à un tirage papier. La gestion des couleurs vous permettra d’obtenir un rendu des couleurs prévisible et satisfaisant.

Les modèles de couleur

Il existe trois modèles de couleur que tout photographe se doit de connaître, à savoir RVB, CMJN et Lab. La plupart des appareils utilisés en photographie numérique utilisent le modèle de couleur RVB pour créer des couleurs, c’est-à-dire les canaux rouge, vert et bleu. Les canaux de couleurs, appelés « couches » dans Photoshop, constituent un des fondements de la gestion des couleurs.



Figure 05: The Additive Colour Model. Red, Green, and Blue light combine to make white light.

Les couleurs numériques ou « lumières » sont enregistrées sous la forme de suite de nombres. Dans le Sélecteur de couleurs, j’ai sélectionné le ROUGE LE PLUS LUMINEUX. En RVB, ce rouge aurait comme valeurs : Rouge 255, Vert 0, Bleu 0. Le modèle RVB utilise des valeurs comprises entre 0 et 255 pour représenter les couleurs. Si l’on changeait ces valeurs pour obtenir Rouge 0, Vert 0, Bleu 0, aucune couleur ne s’afficherait, ce qui signifie que Rouge 0, Vert 0, Bleu 0 est égal au noir. À l’inverse, les valeurs maximales de chaque couche (Rouge 255, Vert 255, Bleu 255) correspondent au blanc. Si les trois couches présentent des valeurs égales comprises entre 0 et 255, on obtient toutes les nuances de gris intermédiaires et en déséquilibrant ces valeurs RVB, on obtient toutes les autres couleurs.


Figure 06: Here is Photoshop’s Color Picker THE BRIGHTEST RED has been set. In RGB that red would be Red 255, Green 0, Blue 0.

 



Figure 07: In digital imaging colours are defined in numbers. In RGB the colours a, b, c, and d in the diagram would be; a = Red 255, Green 0, Blue 0; b = Red 255, Green 255, Blue 255; c = Red 255, Green 200, Blue 200; d = Red 255, Green 255, Blue 200

 

Si des valeurs égales de rouge et de bleu sont ajoutées au ROUGE LE PLUS LUMINEUX, passant de Rouge 255, Vert 0, Bleu 0 à Rouge 255, Vert 200, Bleu 200, alors le ROUGE LE PLUS LUMINEUX devient rose. En changeant les valeurs sur Rouge 255, Vert 255, Bleu 200, on obtient un jaune citron clair. Saisissez ces valeurs dans le Sélecteur de couleurs de Photoshop pour voir le résultat.

Une fois installé sur un appareil photo, un écran ou un scanner, le modèle de couleur RVB devient dépendant de l’appareil, ce qui signifie que la perception du ROUGE LE PLUS LUMINEUX dépendra de l’appareil utilisé.

Dans la pratique, le modèle de couleur CMJN est lui aussi dépendant de l’appareil. Le CMJN est le modèle de couleur utilisé pour imprimer les magazines, les journaux, les posters, les livres, etc. De très nombreuses couleurs peuvent être créées en utilisant différentes combinaisons de cyan, magenta, jaune et noir (CMJN). Si l’on réglait les valeurs CMJN d’une imprimante sur Cyan 0 %, Magenta 0 %, Jaune 0 % et Noir 0 %, le tirage ne contiendrait pas d’encre et donc, aucune couleur, à part celle du papier ou support utilisé pour l’impression. À l’inverse, si toutes les valeurs CMJN sont définies sur 100 %, le tirage serait totalement noir. En réalité, les imprimantes n’utilisent pas 100 % de toutes les encres pour créer du noir, car les zones sombres d’un tirage auraient un aspect qui rappelle le bronze, d'où le terme « bronzing ». La plage de couleurs du modèle CMJN est considérablement plus réduite que celle du RVB,  ce qui implique que certaines couleurs RVB ne peuvent pas être reproduites en CMJN.

Les imprimantes inkjet conçues spécifiquement pour la photographie utilisent d’autres encres en plus des encres CMJN classiques. Ces encres supplémentaires permettent d’étendre la gamme de couleurs de l’imprimante pour se rapprocher des couleurs RVB. Cette particularité permet aux photographes d’imprimer des images RVB avec des imprimantes inkjet sans devoir les convertir en CMJN.


Figure 08: The Subtractive Colour Model: Cyan, Magenta and Yellow combine to make black. Note that the secondary colours here are red, green and blue.


Figure 09: The top row shows individual Cyan, Magenta, Yellow and Black plates. The bottom row shows the build up of plates; Cyan, Cyan & Magenta, Cyan, Magenta & Yellow and finally Cyan, Magenta, Yellow & Black.

 

Si vous préférez les photos monochromes, gardez à l’esprit que les imprimantes inkjet classiques ont du mal à imprimer des nuances de gris neutres, en particulier les vieux modèles et les imprimantes bon marché qui produisent des voiles de couleurs et ne pourront pas imprimer de gris neutres, même en faisant plusieurs réglages. Malheureusement, configurer l’imprimante pour qu’elle n’utilise que de l’encre noire sur du papier blanc n’est pas non plus la solution. Le tirage n’aurait ni la profondeur ni la richesse des nuances d’une photo monochrome. Pour répondre à ce problème, certaines imprimantes inkjet ont plusieurs cartouches d’encre noire. Par exemple, les encres Epson Ultrachrome K3 incluent différentes encres noires (Black, Light Black et Light Light Black) pour réaliser des tirages monochromes de qualité supérieure.

Les valeurs des couleurs doivent être transférées d’un appareil à un autre avec autant de précision que possible. Le ROUGE LE PLUS LUMINEUX d’un appareil photo aura des valeurs RVB différentes de celles d’un écran. Les couleurs doivent donc être configurées du RVB au RVB et du RVB au CMJN. Pour cela, il faut un espace de couleur plus vaste que celui de n’importe quel appareil, c’est-à-dire un espace de couleur qui ne dépende pas des couleurs des appareils utilisés. L’espace Lab est un modèle de couleur qui ne dépend d’aucun appareil ou périphérique C’est un espace de couleur théorique conforme à la perception des couleurs par le système visuel humain.

Le modèle Lab est plus large que les espaces RVB qui dépendent des appareils. Les appareils qui utilisent des modèles RVB ne peuvent donc pas afficher toutes les couleurs que nous percevons et comme nous l’avons dit plus tôt, les espaces de couleur RVB sont généralement plus larges que les espaces CMJN.

L’espace Lab est important, car il permet de répertorier les couleurs de n’importe quel appareil, RVB ou CMJN, avec une grande précision. L’espace Lab joue donc le rôle d’un modèle permettant de convertir des valeurs de couleurs d’un appareil à un autre. Prenons une série d’appareils : étant donné que la couleur la plus intense et lumineuse de chaque appareil sera différente, le ROUGE LE PLUS LUMINEUX de chaque appareil sera lui aussi différent, mais le ROUGE LE PLUS LUMINEUX de chaque appareil peut être répertorié avec précision dans l’espace de couleur Lab.

Revenons-en au Sélecteur de couleurs de Photoshop. Comme vous pouvez le voir sur le Schéma 06, le sélecteur présente de nombreuses valeurs : HSB, RGB, Lab, CMYK et un code hexadécimal (TSL, RVB, Lab et CMJN en français). Pour qu’une couleur puisse être représentée avec précision dans chaque modèle de couleur, elle doit s’inscrire dans la plage de l’espace de couleur le plus petit.

Le système de gestion des couleurs de l’ICC (Comité international de la couleur) repose sur des tables de couleur pour convertir les couleurs d’un appareil source en coordonnées Lab, avant de les coder dans l’espace de couleur du périphérique de sortie. Par exemple, le ROUGE LE PLUS LUMINEUX d’un appareil photo numérique devient la valeur Lab pour le ROUGE LE PLUS LUMINEUX, qui est l’équivalent du ROUGE LE PLUS LUMINEUX d’une imprimante CMJN.

Site Web de l’ICC (Comité international de la couleur) : www.color.org

Traduire des couleurs sur plusieurs appareils

Comme nous l’avons décrit précédemment, la reproduction des couleurs dépend des capacités, c’est-à-dire de la gamme de couleurs (ou gamut) de l’appareil qui reproduit ces couleurs. Quand une image passe d’un appareil à un autre, les valeurs de ses couleurs doivent être traduites et la précision de cette traduction dépend de plusieurs facteurs, notamment la qualité de l’équipement utilisé. Si une photo est enregistrée sur un appareil qui dispose d’un plus grand espace de couleur que l’appareil utilisé pour l’impression, il est très probable que les couleurs les plus vives se perdent lors de la conversion et que le résultat final soit plus terne et plus plat que prévu.

Avant de s’attaquer à la gestion des couleurs, la première étape consiste à s’assurer que chaque appareil sur lequel transitent vos photos dispose d’un profil ICC approprié. Pour cela, consultez le manuel d’utilisation et l’aide en ligne de votre système d’exploitation, de votre logiciel ainsi que des appareils que vous utilisez comme vos appareils photo, scanners et imprimantes. Oui, il est nécessaire de lire les manuels d’utilisation.

Les écrans exigent une attention particulière étant donné qu’ils offrent une fenêtre sur votre travail – imaginez les conséquences que peut avoir un écran affichant un blanc froid au lieu d’un blanc neutre. Les photos qui tendent vers des tons chauds doivent normalement être retouchées pour offrir des nuances de rouge et d’orange plus vives, mais si le blanc de votre écran est froid au lieu d’être neutre, vous aurez tendance à retoucher les couleurs plus que nécessaire et les tons chauds de vos photos seront trop poussés. Étalonner son écran est donc une étape incontournable si l’on veut obtenir des couleurs fiables, tout comme acheter un écran de qualité.

Diagnostiquer votre gestion des couleurs

Que vous choisissiez d’effectuer seulement un étalonnage logiciel ou d’investir dans du matériel d’étalonnage, vous devez être capable de démontrer que vous gérez les couleurs de manière efficace. Cela est particulièrement vrai pour les photographes professionnels qui font appel à des tiers pour imprimer leurs photos. Si les choses tournent mal, ils doivent pouvoir démontrer que l’erreur ne vient pas d’eux. Les kits de diagnostic pour la gestion des couleurs offrent la meilleure solution à ce problème. Voici un exemple qui explique pourquoi il est important de tester votre gestion des couleurs.

Le Schéma 10 présente deux cercles sur fond noir : le premier est gris, mais le deuxième est-il vraiment blanc ?


Figure 10: How white is white?

Utiliser un écran qui peut être étalonné permet non seulement de configurer les valeurs de noir et de blanc de manière appropriée, mais aussi de répertorier correctement les nuances de gris intermédiaires. L’étalonnage matériel est effectué à l’aide d’un instrument de mesure, communément appelé « étalonneur », dont le but est de régler les couleurs d’un écran afin d’éviter tout travail approximatif. Pour souligner ce point, regardez le Schéma 10 : le deuxième cercle représente-t-il le blanc le plus lumineux, ou est-il possible d’ajouter un troisième cercle encore plus blanc ? Seul un instrument de mesure peut répondre à cette question.

Les kits de diagnostic pour la gestion des couleurs contiennent généralement une série de fichiers numériques et de tirages papier correspondants. Pour diagnostiquer votre écran, ouvrez tous les fichiers dans votre logiciel de retouche, par exemple, Photoshop. Si votre gestion des couleurs a été effectuée correctement, ce que vous voyez sur votre écran devrait correspondre aux tirages papier inclus dans le kit de diagnostic. Lorsque vous imprimez les fichiers des échantillons avec votre imprimante, ces tirages doivent correspondre à la fois aux images sur votre écran et aux tirages papier du kit. En résumé, si les tirages papier du kit sont proches des images affichées sur votre écran et des tirages, cela signifie que votre écran et votre imprimante sont correctement étalonnés. Il reste maintenant un dernier test à effectuer. Vous pouvez demander à votre labo photo préféré d’imprimer des copies des fichiers numériques fournis avec le kit. Les tirages réalisés par le labo doivent se rapprocher des tirages des échantillons du kit de diagnostic. S’ils présentent des différences notables, il est possible que le labo photo ait des problèmes d’étalonnage.

La gestion des couleurs n’est pas un processus compliqué en soi, mais la multitude de logiciels et d’équipements disponibles sur le marché fait qu’il peut être difficile de s’y retrouver. Nous avons passé en revue les notions fondamentales de la gestion des couleurs et bien que cet article ne couvre pas tous les aspects de la question, vous devriez maintenant avoir des bases solides pour obtenir des couleurs fiables sur votre écran et sur vos tirages photo.

Conclusion


​Figure 11: Printing should be rewarding, even magical. Getting your colour management in order will lead to great results.

Le but de cet article était de fournir une introduction à la gestion des couleurs. C’est le premier d’une série de douze articles, tutoriels et vidéos dédiés à l’univers de la gestion des couleurs pour la photographie numérique. J’ai écrit plus tôt qu’« en tant qu’enseignant, j’aime voir les réactions des étudiants pendant les cours pour mieux comprendre la manière dont ils perçoivent mes enseignements. » Si vous êtes arrivé jusqu’ici et que les sujets que nous avons abordés vous semblent plus clairs qu’au début, alors j’ai rempli ma mission. Dans de prochains articles, nous aborderons de nombreux autres thèmes comme les préférences couleurs dans Photoshop et Lightroom, l’étalonnage des écrans Colour-Critical, comment réaliser des tirages fine art, comment utiliser un labo photo professionnel et comment gérer les couleurs pendant une séance photo.

Série d’articles et de tutoriels sur la gestion des couleurs par Mark Wood

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